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L’hôtel de la Couronne à Argentière, 150 ans d’hôtellerie

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L’établissement probablement le plus ancien de la vallée qui n’ait jamais changé de destination, l’hôtel de la Couronne d’Argentière est construit dans les années 1860. Un acte de vente rédigé par Maître Dupuis Michel François, notaire à Chamonix, relate, en date du 7 avril 1868, la vente par les héritiers d’Alexandre Dévouassoux « irrévocablement et avec toutes les garanties à Léonie Carrier épouse Devouassoux (de) la moitié d’une maison récemment construite et non encore achevée située à Argentières, visant sur la route de Martigny servant actuellement d’auberge sous l’enseigne la Couronne avec toutes aisances et dépendances soit emplacement champ et jardin contigus…

Diaporama de l’article

  • Légende photo :

    L’hôtel de la Couronne au temps des diligences

  • Légende photo :

    En 1932, l’hôtel de la Couronne est surélevé d’un étage avec toiture à la mansarde

  • Légende photo :

    La patinoire improvisée sur la terrasse en 1964, huile de Marcel Wibault

  • Légende photo :

    Le personnel de l’hôtel au grand complet dans les années 1920

  • Légende photo :

    Etiquette de bagage proposée aux voyageurs

    Est-ce dans un but promotionnel ? Est-ce pour suivre la mode qu’Alexandre Devouassoux donne à son auberge le nom de Couronne ? Ou bien, est-ce tout simplement parce que l’hôtel de la Couronne à Chamonix a été détruit dans le grand incendie du 20 juillet 1855 ? Une vitre du salon de l’hôtel porte, aujourd’hui encore, cette inscription gravée «18 juillet 1865»

    L’arrivée du chemin de fer à Argentière en 1907 a, évidemment, engendré l’éclosion de tous les hôtels. Ainsi, peut-on compter, au «Registre de police des personnes étrangères à la localité» pour la saison d’été 1928 (27 mai-14 septembre), 399 personnes ayant pris pension dans l’hôtel. Pour servir tout ce beau monde, les gens du pays sont, bien sûr, sollicités. Certains s’engagent complètement au sein du personnel saisonnier : femmes de chambre, commissionnaires… D’autres se spécialisent dans du travail à domicile comme les blanchisseuses. Du personnel saisonnier est, par ailleurs, embauché à l’extérieur et logé par ses patrons. Cette année-là, l’hôtel de la Couronne a pris à son service :  un cuisinier et deux employés de cuisine, une fille de cuisine, une lingère et une femme de chambre, une secrétaire, une sommelière et deux domestiques…

    Jusqu’en 1932, l’hôtel ne comporte que deux étages. Il est tenu, successivement par la famille Devouassoux, puis par la famille Devouassoux-Müller. L’héritière, Madame Lamy, prend les commandes à son tour et modernise : le bâtiment est surélevé d’un troisième étage et la totalité des chambres bénéficient maintenant du chauffage central. Une amélioration notable, y compris pour les quelques meilleures chambres autrefois dotées d’une cheminée. On accueille désormais confortablement les hivernants.

    Entre 1935 et 1938, Monsieur Fillioud prend la tête de l’hôtel avant de la confier à Monsieur Vinsonneau, viticulteur en Anjou, pour qui l’activité hôtelière n’est qu’un passe-temps estival. Il y reçoit ses amis et organise des soirées qui durent le temps des beaux jours.

    La trop courte période des championnats du monde de ski de 1937 est, évidemment, vécue comme une fête par les hôteliers d’Argentière qui n’avaient pas prévu une telle aubaine. À la Couronne, les chambres sont pleines, les escaliers et les couloirs grouillent de monde. L’un des organisateurs, Georges Reusser, commerçant en articles de sport, s’est installé près de l’usine électrique, à la sortie nord d’Argentière. Pourtant prévenu des risques potentiels d’avalanches sur cette pente, baptisée depuis piste de la FIS, il reste déterminé à vouloir organiser la manifestation… et la course se déroule le plus parfaitement du monde.

    Le lendemain même de la course de slalom qui a vu l’éclatante victoire d’Emile Allais, l’avalanche descend… Tout aurait été emporté.

    Les sports d’hiver attirent, dorénavant, une clientèle nombreuse d’amateurs de champs de neige… sauf l’hiver 1964 pendant lequel il ne tombe pas un flocon de neige ! Mais le froid sibérien et quelques bons arrosages ont transformé la terrasse de l’hôtel en patinoire, une belle aubaine pour les hivernants !

    Texte rédigé en 1999 par Joëlle Dartigue-Paccalet à l’occasion des Journées du Patrimoine grâce aux souvenirs généreusement partagés de Pierre Mortier, patron de l’hôtel depuis 1958.