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Le chemin de fer à Chamonix : sous la neige

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Avec la naissance des sports d’hiver, les adeptes de la neige et de la glace souhaitent, tout naturellement, pouvoir se rendre en train vers leur station. À Chamonix, les premiers jours de décembre voient arriver les premiers hivernants. Très vite approche la semaine de Noël avec ses concours et ses fêtes puis celle du nouvel an, réservée aux courses, excursions collectives, promenades en traîneaux. Enfin, pendant la « Grande Quinzaine » (deuxième quinzaine de janvier) se disputent les grands concours internationaux : ski, patinage, saut… pour se terminer dans la fête, pendant les premiers jours de février avec des courses populaires de bobsleigh, luge, traîneau, tailing ou autre ski-jöring, sans oublier les concours de statues ou monuments en neige, très à la mode.

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    Chasse-neige à étrave

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    1984 : une avalanche descendue des Chéserys bloque la voie vers la Joux

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    1924 à la gare des Bossons : les skieurs de retour du tremplin du Mont

    Dans le but de mieux satisfaire leur clientèle, les hôteliers demandent au conseil municipal, dès l’hiver 1902, de délibérer pour que le P.L.M. assure un service d’hiver. « La Cie P.L.M. a pu prendre des arrangements pour assurer un service en voitures ou à traîneaux pendant l’intervalle où le fonctionnement des trains ne pourrait avoir lieu ; seulement ce service est absolument défectueux et insuffisant. Il arrive presque journellement que des personnes en quittant le chemin de fer au Fayet ne peuvent monter à Chamonix, les voitures ou traîneaux devant assurer le service de transbordement étant déjà au complet. D’autre part la Cie n’a établi que deux trains par jour pour l’hiver, inconvénient sérieux pour le commerce, les services administratifs et autres ».

    Ce souhait sera assez rapidement exaucé puisque le chasse-neige fait preuve d’efficacité. Deux premiers engins sont construits dans les ateliers P.L.M. en 1906 et 1907. A l’avant d’un truck-moteur est disposé un éperon de tôle, appelé aussi « bouclier », dont la forme triangulaire imite celle de la herse qu’on utilise depuis longtemps derrière les chevaux pour déneiger les routes. L’ensemble de la partie triangulaire est largement lesté pour éviter tout risque de déraillement et, suivant la lente marche du chasse-neige, des ouvriers travaillent à la pelle pour dégager les parties plus glacées que l’engin, malgré son poids, ne pourrait pas repousser.

    Et c’est ainsi que, très rapidement, la Compagnie P.L.M. pourra mettre à disposition des hivernants des trains spéciaux pour Chamonix : « De Paris à Chamonix, la Cie P.L.M. met en marche l’hiver trois trains pour Chamonix (90 fr. en 1ere classe, 60 fr. en 2e), l’un (22 décembre-11 février) partant vers 21 h.10 (lits-salons de Paris au Fayet, 1ere et 2e classes), arrivant à Chamonix vers 12h 46, un autre (23 dec.-12 fév.)-, via Aix-les-Bains, partant vers 22h 15 et arrivant à 10h 48, et l’autre (toute la saison), partant vers 22h 25 et arrivant à Chamonix vers 16h 31. Des trains commodes sont également prévus de St-Etienne, de Chambéry, d’Aix-les-Bains, de Nice et Marseille. Des billets spéciaux d’aller-retour avec réduction de 20 à 43 0/0, valables 15 j. sont délivrés du 30 nov. au 28 fév. avec faculté de prolongation de 2 périodes de 8 j. chacune, moyennant 10 p. 100 du prix pour chaque prolongation ».

    Jusqu’à Chamonix, et même jusqu’aux Tines, le problème de l’enneigement semble être résolu. Mais il n’en est pas de même pour la partie amont de la ligne.

    En novembre 1906, le Conseil Municipal délibère à nouveau en faveur d’un service jusqu’à Argentière. « En raison de l’importance prise par le village d’Argentières dès la construction du chemin de fer et de l’utilité pour les habitants de cette section de l’organisation d’un service d’hiver, l’organisation d’un service permanent serait en effet d’une grande utilité non seulement pour les habitants de notre vallée mais encore pour les touristes qui viennent de plus en plus nombreux passer une partie de la mauvaise saison soit à Chamonix soit à Argentières ».

    Malgré cette forte pression, la réponse du Sous-Préfet reste négative : « Vous m’avez transmis une délibération du Conseil Municipal de Chamonix tendant à l’organisation, pendant l’hiver, d’un service de trains régulier entre Chamonix et Argentières. Saisie de cette demande, la Cie P.L.M., après une étude approfondie, a présenté les observations suivantes :

    – En raison de la fréquence et de l’importance des avalanches sur une partie de la ligne, la sécurité exigerait, en certains points, la construction de galeries couvertes, très désagréables aux touristes pendant l’été. Il en résulterait d’ailleurs des dépenses qui ne seraient pas motivées par une fréquentation suffisante en hiver.

    – Au surplus, la neige, à cette altitude, constitue un obstacle souvent insurmontable et la circulation est déjà, de ce fait assez difficile entre le Fayet et Chamonix. Or, l’hiver dernier, la somme des hauteurs de chutes successives n’a été que de 0,40 m au Fayet alors qu’elle s’élevait à 3,13 m à Chamonix et atteignait 6,63 m à Argentières, si bien que dans la période comprise entre janvier et mai 1907, la Compagnie même avec le libre choix des jours et des heures les plus propices, n’a pu réussir à faire des trains de matériaux jusqu’au col des Montets.

    – Il convient, en outre, de remarquer que le mouvement des voyageurs de Chamonix sur Argentières serait vraisemblablement très peu important, Chamonix paraissant bien le centre indiqué pour les sports d’hiver.

    En présence de ces observations, dont les fonctionnaires de contrôle ont reconnu le bien-fondé, il ne m’a pas paru possible d’insister auprès de la Compagnie pour la réalisation du vœu de la municipalité de Chamonix ».

    Il faudra attendre plus de dix ans avant que cette fin de non-recevoir soit rediscutée et que ne soient réellement étudiées d’autres possibilités de déneigement et de protection contre les avalanches.

    De fait, le chasse-neige à éperon, bien que très efficace dans certains cas, ne peut pas fournir de bons résultats en cas de trop grosse épaisseur de neige. Par ailleurs, la neige repoussée par l’étrave s’accumule sur le bord de la voie, finissant par constituer de véritables murs de neige de part et d’autre.

    Le P.L.M. s’inspire alors d’un modèle fabriqué aux Etats Unis appelé « rotary » pour fabriquer son propre chasse-neige rotatif : une turbine aspire la neige et la glace qu’elle pulvérise avant de la rejeter le plus loin possible dans les champs. Les premières fraises à neige font leur apparition, apportant la solution aux grosses accumulations de neige.

    Mais il reste le délicat problème des couloirs d’avalanches. Entre les Tines et Montroc, on les répertorie et on essaie de leur trouver une parade. De nombreux mois seront nécessaires aux études avant qu’enfin, le 12 août 1926, un projet du P.L.M. soitt soumis à l’approbation du Conseil Municipal :

    « J’ai l’honneur de vous adresser ci-joint un exemplaire de ce projet qui comprend deux sous-projets correspondant aux deux sections de ligne des Tines à Argentière et d’Argentière à Montroc-le Planet.

    Ce projet comporte les dispositions suivantes :

    – Sauf au droit de la cascade de Chézery, où il nous a paru possible de protéger la ligne contre les avalanches qui en descendent par un mur en chevron rejetant ces dernières dans deux ravins voisins, le dispositif envisagé comporte l’établissement de galeries couvertes en ciment armé reposant sur un mur de soutènement du côté de la montagne et sur piliers espacés généralement de 5 m environ du côté de la vallée.

    – La longueur de ces galeries et la position kilométrique de leurs extrémités ont été déterminées d’après les limites d’encombrement des avalanches de ces derniers hivers.

    – Leur largeur libre entre le mur et les piliers serait de 4,25 m et la hauteur libre minimum au-dessus du rail serait de 4,30 m.

    – Dans la partie haute du mur de soutènement, côté montagne et sous la toiture de la galerie, des consoles espacées de 15 m au maximum et protégées par un grillage métallique supporteraient les câbles aériens de la ligne à haute tension. La toiture des galeries serait prolongée, côté montagne, jusqu’à sa rencontre avec le profil naturel du terrain, par un remblai épaulant et protégeant le mur de soutènement. Le sommet du remblai et de la galerie serait dressé suivant une déclivité de 0,25 m vers la vallée, de façon à faciliter le glissement des avalanches et éviter leur accumlulation sur la galerie ».

    Ces galeries paravalanches seront construites au cours des années suivantes, tout comme le mur-éperon de déviation de l’avalanche des Chéserys. Les années 1930 verront alors les trains circuler tout l’hiver jusqu’à Montroc.

    Courrier du PLM pour sports d’hiver 36-37 (17 octobre 1936

    Le PLM a voulu que la pratique des Sports d’hiver soit, cette année, plus facile encore que précédemment. Nous tenons à vous faire connaître les premières améliorations qui peuvent, d’ores et déjà être communiquées :

    1 – tarifs : Indépendamment des tarifs que vous connaissez bien :

    – Billets de week-end (50 % de réduction pour distances supérieures à 200 km aller et retour – validité à 4 jours pleins qui seront délivrés cette année à partir du 23 octobre.

    – Billets de séjour (20 % ou 25 % de réduction – 20 jours de validité.

    – Billets de groupes 50 % de réduction – 20 jours de validité.

    – Billets de famille (75 % de réduction à partir de la 3e personne – Validité : 40 jours.

    Nous vous signalons que les billets de congé annuel (40 % de réduction 3e classe exclusivement – validité 1 mois) continueront à être délivrés jusqu’au 31 décembre avec validité pour le retour jusqu’au 7 janvier 37.

    Billets avec réduction de 60 % – En dehors des forfaits que vous pourrez combiner en utilisant les tarifs ci-dessus vous pourrez également en établir à des prix particulièrement intéressants au moyen de trains spéciaux comportant les avantages suivants :

    – 60 % de réduction en 2e et 3e classes.

    – Faculté de retour par trains du service normal dans un délai maximum de 8 jours y compris le jour du départ (billet prolongeable 2 fois de 4 jours moyennant paiement chaque fois de 10 % du prix du billet initial).

    Au départ de Paris sont prévus :

    – 15 janvier : un train direction Chamonix.

    – 29 janvier : un train direction Chamonix Bourg St Maurice

    – 26 février : un train direction Briançon.

    Au départ de Lyon :

    – 9 janvier : un train direction Briançon

    – 23 janvier : un train direction Chamonix

    – 27 février : un train direction Bourg St Maurice.

    Au départ de Marseille :

    – 30 janvier : un train direction Briançon.

    Nous vous signalons enfin que les billets combinés fer-autocars « Sports d’hiver » vendus l’année dernière de décembre à février seulement seront délivrés cette année du 23 octobre au 2 mai.

    2 – Horaires :

    – La période de circulation des grands rapides du soir à destination de la Savoie a été sensiblement étendue : elle commencera 15 jours plus tôt que l’an dernier (début décembre) et cessera un mois plus tard (fin mars ou début avril suivant les relations).

    Le départ du rapide 659 (direction Chamonix et Bourg St Maurice) a été retardé de 15 minutes. Ce train quittera donc Paris à 19h45 au lieu de 19h30 sans que les heures d’arrivée soient changées. Cette modification donnera satisfaction à la clientèle très nombreuse qui, occupée jusqu’en fin d’après-midi, doit dans un temps relativement court trouver celui de dîner et de gagner la gare.

    – Il sera possible cette année de quitter Paris le samedi à 13 heures et d’arriver le soir à minuit à Chamonix ou à Bourg St Maurice. Cette facilité sera certainement très appréciée par les personnes qui, ne désirant pas voyager de nuit, ne veulent pas non plus quitter Paris de bonne heure le matin. Elle intéressera également les skieurs de « week-end » auxquels elle permettra de ne pas passer deux nuits de suite dans le train.

    – Des améliorations ont été apportées à de nombreuses correspondances automobiles. Nous vous signalons, à titre d’exemple, qu’une nouvelle liaison par car permettra aux amateurs de Megève de repartir pour Paris en s’embarquant, non plus à Sallanches, mais au Fayet St Gervais. Or la gare du Fayet St Gervais comporte un buffet et est en tête de ligne pour les trains de retour vers Paris. Il en résultera donc pour votre clientèle de plus grandes facilités d’installation dans les voitures.

    3 – Le « Service PLM »

    – L’excellent accueil réservé à nos fiches PLM nous a incités à les rééditer. La nouvelle édition plus complète que celle de l’année dernière, vous sera envoyée vers le 20 octobre. Nous nous permettons de vous rappeler que ces fiches n’ont pas été créées seulement pour faciliter le travail de vos collaborateurs mais aussi pour être placées à la disposition du public qui visitera votre agence. Nous souhaitons que de nombreux clients viennent les consulter à vos bureaux.

    – Notre bulletin météorologique (dernière heure de la neige) paraîtra cette année à partir du 1er novembre. Il vous sera envoyé régulièrement le jeudi. Mais tous les jours, à partir de 11h, et particulièrement le vendredi et le samedi, vous pourrez obtenir par téléphone soit à la gare de Lyon soit à notre bureau de la rue St-Lazare soit à la Maison du Tourisme la « dernière heure de la neige ».

    – De même que l’an passé nous nous efforcerons de suggérer le désir des sports d’hiver dans le public par un important programme de publicité comportant campagne de presse, de radio, d’affichage, de cinéma et une importante diffusion d’imprimés.

    Une courte campagne de presse annoncera, au début d’octobre, nos nouvelles dispositions tarifaires et les principales modifications apportées à nos services. Notre effort reprendra ensuite vers le 15 novembre pour se poursuivre jusqu’au printemps.

    À partir du 15 novembre également, nous procéderons à une campagne d’affichage (une vingtaine de grands panneaux situés dans les principales artères de Paris et un affichage important dans les grandes villes de province). Dans les principaux cinémas de Paris, nous ferons passer des films d’entracte et nous procéderons à des émissions de communiqués par radio.

    Pour renseigner votre clientèle sur nos stations des Alpes et du Jura nous mettrons à votre disposition un dépliant illustré et notre horaire bleu « Sports d’Hiver » dans lequel nous avons essayé de donner, sous une forme pratique, l’essentiel des renseignements indispensables sur les principales stations de sports d’hiver de notre réseau, en même temps que l’indication des principales relations. Vous recevrez livraison d’un premier approvisionnement de ces imprimés incessamment.

    4 – Aux skieurs de « week-end » vous pourrez signaler la création en gare de Lyon d’une consigne spéciale pour skis.

    D’un « week-end » à l’autre et sur présentation d’une carte spéciale, les skieurs pourront y laisser leurs skis et bâtons et ne pas s’en encombrer dans leurs trajets à travers Paris. 2 tarifs sont prévus : carte saison (6 mois) : 15 fr. et carte demi-saison (3 mois) : 10 fr.