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Le téléphérique des Glaciers

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Rien ne saurait être plus profitable au développement du mouvement des étrangers que l’établissement d’un chemin de fer conduisant le grand flot de touristes au cœur même de la chaîne du Mont-Blanc et qui permettrait d’en admirer de près les beautés et les merveilles.

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    Au cours de la construction

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    Au cours de la construction

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    Gare de départ aux Pèlerins

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    1927 La benne arrive au pylône

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    La benne quitte la station des Glaciers

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    1943 – Des ouvriers à la gare supérieure des Glaciers

    C’est en ces termes que les promoteurs du téléphérique des Glaciers présentent leur projet devant le conseil municipal de Chamonix en 1904. Leur chemin de fer s’appelle aussi funiculaire aérien ou ascenseur à câble et correspond à une méthode brevetée Feldmann. Chez nos voisins Suisses, ce genre d’équipement commence à être bien connu, et les touristes, toujours plus nombreux, semblent y trouver leur comptant.

    Le chemin de fer dessert Chamonix depuis 1901, les sports d’hiver attirent une nouvelle clientèle, ce qui nécessite de nouveaux équipements. La Vallée Blanche, si difficilement accessible aujourd’hui, deviendra une vraie station de sports, dès qu’elle sera reliée à la région habitée par un moyen de communication rapide et que les touristes pourront trouver abri Les chutes de neige n’ayant aucune influence sur le bon fonctionnement des ascenseurs à câbles, l’exploitation régulière pourra être maintenue jusque bien avant dans l’automne, ce qui prolongera sensiblement la durée de la saison des étrangers à Chamonix, dans des hôtels ou refuges à n’importe quelle altitude.

    Le projet est exaltant. Il est adopté à l’unanimité, confié, in fine, à la Société milanaise Ceretti & Tanfani et construit par l’entreprise française Dyle & Bacalan.

    On a prévu, dans un premier temps, que la gare de départ se situerait sur la rive droite de l’Arve, les câbles survolant les Pèlerins et la ligne étant ponctuée de stations : cascade du Dard, Para, Pierre Pointue, glacier des Bossons, glacier Rond, Rocs Percés et enfin aiguille du Midi. Mais les habitants du village n’apprécient pas franchement la perspective de voir des cabines passer au-dessus de leurs champs. Aussi demandent-ils aux promoteurs de modifier ce tracé.

    Après tergiversations et modifications incontournables, les travaux commencent en été 1909. On établit une tranchée dans la forêt, les arbres coupés étant utilisés comme pylônes provisoires pour la ligne de service. Le chantier doit, bien sûr, s’interrompre en hiver. Dès le printemps suivant, les ouvriers reprennent leur tâche, travaillant d’arrache-pied pour compenser les intempéries. Ils ne parviennent à la Para qu’en 1923.

    Ce tronçon, utilisé jusqu’au pylône double de la cascade du Dard pour la remontée des bobs lors des Jeux Olympiques de 1924, sera inauguré officiellement le 15 juillet 1924.

    La gare de départ, par contre, a déjà été inaugurée l’année précédente, juste avant les premières épreuves de bob comptant pour les Jeux Olympiques d’hiver. Elle n’est pas d’accès facile, les routes qui y conduisent restent étroites et mal commodes. Pourtant les touristes aiment se retrouver dans ce petit bâtiment de bois et de pierre qui rappelle, par certains côtés, les coquettes petites gares suisses. Les appareillages sont taillés dans le granit du pays, de même que les marches de l’imposant escalier double qui grimpe depuis la route. A l’intérieur, on utilise également le granit pour les marches conduisant aux plates-formes d’embarquement.

    Devant, une agréable galerie couverte accueille les voyageurs. Des piliers de bois sculptés en soutiennent la toiture, laquelle s’agrémente de planches ouvragées à la manière des chalets tyroliens.

    La station intermédiaire de la Para est construite assez loin du pavillon-buvette où les touristes avaient l’habitude de faire halte. A l’inverse de la gare de départ, celle-ci apparaît comme une vraie forteresse, tout entière construite de blocs de granit prélevés et taillés sur place, dans la montagne. La partie basse accueille les voyageurs qui viennent de Chamonix, et la partie haute expédie jusqu’à 2500 mètres d’altitude les plus courageux – ou les plus fous – qui osent braver les éléments de la haute montagne. Entre les deux, des locaux communs abritent les parties techniques, bien sûr, mais aussi les guichets, salles d’attente et restaurant. Entre la Para et les Pyramides, la traversée du glacier des Bossons est possible. De part et d’autre de la langue glaciaire, les sentiers sont aménagés et élargis pour faciliter les pas des guides et de leurs clients. A la Para, les excursionnistes trouveront de quoi se restaurer et se désaltérer afin de se remettre de leurs émotions. « Le buffet-restaurant propose en 1924 un déjeuner ou un dîner au prix de 15 francs, un goûter pour 4 francs. «Glaces renommées, five o’clock tea et liqueurs de marque» sont offerts aux visiteurs, qui, s’il ne déjeunent pas à leur hôtel pour effectuer «l’excursion la plus hardie à la portée des touristes», peuvent réclamer un «ticket de compensation» et se restaurer gratuitement en altitude. »

    Le deuxième tronçon, avec la gare des Glaciers, sera inauguré en 1927. Comme à la Para, la construction de la gare nécessitera de faire appel aux tailleurs de pierre italiens. Ils sont connus et réputés pour leur savoir-faire, et l’ensemble des ouvrages publics de la vallée, ponts et viaducs, sont le fruit de leur œuvre. C’est à eux que l’on doit également la plupart des balcons, consoles, linteaux et encadrements de fenêtres des hôtels. Ils trouveront, pour ce chantier hors du commun, une difficulté supplémentaire : celle d’avoir à travailler dans des conditions extrêmes de haute montagne avec la neige et surtout le gel…

    Ainsi, pendant quelques années, le plus haut téléphérique du monde emportera dans ses cabines luxueuses les touristes en mal de sensations fortes. Six places assises dans le compartiment du milieu, des places debout et des strapontins pour les deux plates-formes de chaque côté… Avec des vitres aux fenêtres et du cuivre pour l’accastillage, elles ont belle allure les petites cabines rouges. Les planchers sont recouverts de caillebotis en bois reposant, dans le compartiment central, sur un linoléum. Le compartiment et chaque plate-forme sont dotés de lampes électriques et un projecteur est fixé au rebord du toit de chacune des plates-formes, alimenté par une batterie installée sous le plancher. On n’accède à la cabine que du côté extérieur à la ligne ; la porte du compartiment et les portillons de chaque plate-forme s’ouvrent en glissant le long de la paroi sur des roulements à billes. Tous ceux qui emprunteront le funiculaire aérien se souviendront avec nostalgie du confort de cette cabine digne d’un train de première classe.

    Texte et illustrations : Joëlle Dartigue-Paccalet, brochure du patrimoine 2006

    1910 – A l’ASSAUT du MONT-BLANC : Le chemin de fer de l’Aiguille du Midi

    Il y a quelque temps déjà, un ingénieur suisse imaginait au Watterhorn au système de funiculaire pour aller de Grindewald au sommet même du Watterhorn. Un wagon circule, suspendu à un câble accroché au rocher ou supporté par des pylônes métalliques. Les portées entre les deux pylônes peuvent atteindre plusieurs centaines de mètres. La traction est électrique et transmise au wagon par un câble tracteur. Eugster, de Dijon, a décidé d’appliquer ce système à un funiculaire à créer entre le village des Pèlerins, à 1 000 mètres d’altitude près de Chamonix et l’Aiguille du Midi (3 842 m).

    L’idée des promoteurs est :

    1° de permettre au grand public de voir de près et de parcourir à peu de frais un grand glacier supérieur, chose qui n’existe nulle part en France, et cela en ne sacrifiant au point de vue alpiniste qu’une aiguille de second ordre dans le massif et assez dédaignée aujourd’hui des grimpeurs, bien que la vue y soit de toute beauté.

    2° de permettre l’accès depuis Chamonix des hautes cimes qui entourent la vallée Blanche et la partie supérieure du glacier du Géant ; l’éloignement du col du Géant et du Rifugio Torino empêchent en effet beaucoup d’alpinistes d’y aller du côté français.

    3° de faciliter l’établissement en plein été des sports « d’hiver », la vallée Blanche offre près du col du Midi une admirable surface ondulée de près de deux kilomètres carrés souvent couverte de neige fraiche ou remaniée par le vent et essentiellement skiable. Il y a, de plus, du col du Rognon au glacier du Géant, une magnifique pente sans crevasses appréciables d’environ un kilomètre de longueur sur 300 mètres de différence de niveau, qui est toute indiquée comme pente de luge, bobsleigh, etc.

    Un hôtel confortable sera construit au col du Midi. Le point de départ de la ligne sera au village des Pèlerins et la première section ira jusqu’à Pierre-à-l’Echelle environ (2 400 m) avec station intermédiaire à la Para et à Pierre Pointue. La seconde section ira de Pierre-à-l’Echelle au col di Midi (3 555 m). De là, une branche secondaire du funiculaire conduira au sommet de l’aiguille. La petite gare du sommet sera dissimulée derrière les rochers visibles de Chamonix pour ne pas déparer le paysage.

    Le prix de la place aller et retour sera de 27 fr. 50.

    Telle est l’économie générale du projet. La concession est d’ores et déjà obtenue, les fonds réalisés. La première section, actuellement en construction, sera, selon toutes prévisions, ouverte en 1911. La section suivante, jusqu’au col d Midi, demandera environ quatre ans pour achèvement, dit la revue du Club Alpin.

    Extrait d’article presse locale Archives départementales Haute-Savoie