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Servoz, autour de l’église

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Il était une fois,

1925 ! Par ce beau dimanche, la rue de Servoz voit passer trois petites filles se rendant à l’église St Loup, leur paroisse. L’une vient de Montcoutant (commune de Passy). Elle a emprunté l’étroite route de terre qui descend dans la forêt et enjambe le tunnel du Châtelard. La deuxième arrive de Vaudagne (commune des Houches). En passant par la Fontaine, il lui a fallu trois bons quarts d’heure de marche. La troisième, (commune de Servoz) a déboulé tout droit le long de la Bosna depuis le Mont pour rejoindre ses amies au plus vite. La cloche a sonné, elles entrent.

Diaporama de l’article

  • Légende photo :

    Petites filles se rendant à la messe

  • Légende photo :

    Porte du tabernacle de l’église représentant le traditionnel pélican nourrissant ses petits

  • Légende photo :

    Statuette de la Vierge écrasant le serpent

  • Légende photo :

    Pèlerinage à la chapelle du Lac

  • Légende photo :

    Vitrail chapelle du Lac

  • Légende photo :

    2016 Foire aux moutons

    Il était une fois,

    1925 ! Par ce beau dimanche, la rue de Servoz voit passer trois petites filles se rendant à l’église St Loup, leur paroisse. L’une vient de Montcoutant (commune de Passy). Elle a emprunté l’étroite route de terre qui descend dans la forêt et enjambe le tunnel du Châtelard. La deuxième arrive de Vaudagne (commune des Houches). En passant par la Fontaine, il lui a fallu trois bons quarts d’heure de marche. La troisième, (commune de Servoz) a déboulé tout droit le long de la Bosna depuis le Mont pour rejoindre ses amies au plus vite. La cloche a sonné, elles entrent.

    Un édifice sanctuarisé, luxueux et rassurant…

    En poussant la lourde porte, on distingue sur son battant de bois sculpté le personnage de Saint Loup (patron de la paroisse) foulant le dragon. C’est la représentation symbolique, affirment certains, de la victoire du saint patron sur les deux rivières torrentueuses de Servoz, l’Arve et la Diosaz.

    Pénétrer dans ce modeste édifice est un réconfort pour les familles : des murs colorés, de jolies statues peintes, des dorures reflétant la lumière des lustres, une touchante sculpture en bois de la Vierge à l’Enfant *, dans un style baroque populaire… Trois travées voûtées d’arête conduisent au chœur coiffé d’un plafond en étoile. C’est la partie la plus ancienne du bâtiment, datant de 1537, comme gravé sur le linteau de la porte nord. Au fond du chœur se dresse le retable, le mobilier le plus important, composé de statues, de colonnes, d’angelots ou de peintures. L’ensemble constitue l’écrin du tabernacle, sorte de coffre-fort sacré renfermant le « trésor » de l’église et dont la porte ferme à clé. Une superbe sculpture en ronde-bosse dorée à la feuille orne cette porte mystérieuse. On y distingue un pélican nourrissant ses petits, une image couramment utilisée dans la chrétienté.

    … mais parfois envié, massacré et ruiné !

    On ne se doute pas que ces murs, silencieux réservés à la prière ou à la méditation, puissent être victimes de saccages irréversibles. Pourtant, dans la vallée de Chamonix comme partout, la Révolution Française leur causera d’énormes dommages.

    Lorsque l’armée des Allobroges venue de Paris entre en Savoie, acclamée par les Savoyards, elle chasse les Piémontais et prend possession des terres. Nous sommes en 1792 et le mont blanc a été gravi pour la première fois six ans auparavant. Mais les années troubles qui suivent ne seront pas propices à la venue de voyageurs.

    La Savoie est devenue française et les soldats nationalistes tuent les opposants, pillent les maisons, démolissent les clochers et réquisitionnent les cloches pour les fondre. Les trésors sacrés, calices et ostensoirs d’or ou de vermeil, sont volés, les cultes catholiques interdits. On célèbre la « Déesse Raison »… À Servoz, le curé Jean Baptiste Galland n’a pas eu le temps de se cacher. Il mourra sous les coups de Joseph Marie Devillaz. Devant l’église, se dresse dorénavant l’arbre de la Liberté, épicéa noueux chargé du symbole de la laïcité qui interdit tout, y compris les obsèques religieuses. Pas de cloches, pas de sacrement pour les défunts… Les villageois n’en peuvent plus. Marie Couttet dit Moutelet, guide de Chamonix, viendra abattre ce totem impie avant de s’enfuir à travers les glaciers jusqu’en Val d’Aoste.

    … puis restauré, reconstruit.

    Après les ravages de la Révolution, l’église est sérieusement endommagée et il lui faudra plusieurs décennies avant de retrouver de plus beaux atours.

    L’autel principal et les autels latéraux sont restaurés en 1842 et ornés de tableaux. À gauche, une toile montre une Madone à l’enfant entourée des quinze médaillons traditionnels. À droite, une peinture à l’huile d’assez grandes dimensions représente Notre-Dame du Bon Secours devant laquelle est agenouillé, en bas à gauche, un personnage tête nue, vêtu de noir avec col de fraise, vraisemblablement le donateur. Signée Raull et datée de 1661, cette toile a ceci d’original qu’elle présente beaucoup d’analogies avec celle d’un tableau de Lukas Cranach l’Ancien, installé au-dessus du maître-autel de la cathédrale St-Jacques d’Innsbruck (Autriche).

    Et aujourd’hui ?

    Reconstruit en 1857 et objet de travaux récents (2008), le clocher à lanternon octogonal surmonté d’un dôme, embryon de bulbe, rythme toujours les heures de la vie quotidienne. Grâce à un programme complet de restauration, l’église St Loup a encore de belles années devant elle. Avec une vaste esplanade de pelouse agréable, l’ensemble accueille, aujourd’hui comme hier, les manifestations organisées par et pour les habitants.

    Encart :

    La chapelle Notre-Dame du Lac

     L’orographie s’est, de tout temps, joué des caprices des politiques dans ce bassin de vie étroit où l’homme doit s’adapter aux tribulations des cours d’eau et des montagnes. La chapelle du Lac comme l’église du chef-lieu en témoignent, passant d’une rive à l’autre des rivières, contraintes par les crues ou les éboulements qui font bouger les frontières.

    La chapelle Notre-Dame du Lac, datant de 1896 et restaurée récemment, rappelle, avec le petit oratoire creusé dans la roche de son soutènement, ces siècles de va-et-vient incessants. Décorée de frises, draperies en trompe-l’œil et fresques, fenêtres en forme d’ogive et garnies de vitraux, elle arbore au-dessus de l’autel une statue de Vierge écrasant le serpent.

    C’est pour cette dernière que, traditionnellement, chaque dimanche suivant l’Ascension, une procession est organisée, réunissant des fidèles de toute la vallée.

    Illustrations collection personnelle

    Documentation : mairie de Servoz (Chantal Forté) et association Servoz, Histoire et traditions (André Derisbourg).

    * statuette malheureusement volée

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