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Les costumes traditionnels chamoniards

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Les costumes portés par le groupe folklorique Les Rhodos Chamoniards se réfèrent aux vêtements de fête portés par les femmes au XIXe siècle. Pour les messieurs, le groupe a choisi de porter le costume de Jacques Balmat, vainqueur du Mont-Blanc, c’est-à-dire fin du XVIIIe siècle.

Diaporama de l’article

  • Légende photo :

    La fête des rhodos – le char des guides

  • Légende photo :

    Femme au rouet

  • Légende photo :

    Métier à tisser détail

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    Rouet détail

  • Légende photo :

    Groupe costumé

    Le textile

    Le chanvre : la vallée de Chamonix porte, dans ses lieux-dits, le souvenir des champs de chanvre, plante textile cultivée de tout temps : chènevières (sch’névis en patois). Les habitants y font pousser la plante fibreuse dont ils confectionnent tissus et cordes.

    « Chaque ménage fait chez soi en hiver sa toile nécessaire. Le particulier qui n’a pas de chanvre suffisamment l’achète à Sallanches ou dans les environs » écrira le maire au début du XIXe siècle.

    Planté au printemps, le chanvre est récolté en automne pour être roui. Cette opération consiste à laisser tremper les tiges dans des fosses emplies d’eau, les naies, pendant deux à trois semaines. Assouplies, elles se fendent alors et leurs fibres commencent à se détacher les unes des autres. C’est le moment du broyage où, dans les foulons (moulins à chanvre), une meule va écraser la fibre pour l’assouplir encore. Les mains des femmes prendront alors le relais de la machine pour le teillage : détacher brin par brin toutes les fibres de la plante. « Il fallait d’abord prendre le brin de chanvre à son extrémité la plus grosse et dégager la rognure de sa filasse. On « déchaussait » la tige ; ensuite, il fallait tirer sur le bout du ruban ainsi obtenu et arracher toute la filasse du brin. »

    Ces queues de chanvre sont mises à sécher à la grange jusqu’à la fin de l’hiver. Bien secs, les brins de filasse sont ensuite peignés entre deux gros peignes à longues dents métalliques, les clériés, qui assoupliront encore la fibre.

    La rite, fibre la plus fine et la plus longue, sera réservée aux draps de première qualité. L’étoupe, plus grossière, sera éventuellement mêlée de laine pour tisser la tiretaine : une étoffe plus rude, plus chaude mais moins douce. Le bayon, enfin, servira au cordier : dans notre vallée, des générations de paysans-guides utiliseront les cordes de chanvre pour les travaux des champs comme pour la montagne. Pas très longues – douze à quinze mètres tout au plus – ces cordes sont réputées très solides. Les fibres torsadées résistent à des surcharges importantes… pour peu qu’elles n’aient pas été mouillées. En effet, le chanvre resté humide devient très vite putrescible et perd alors l’essentiel de ses qualités.

     

    Le lin : selon de Saussure, le lin cultivé dans nos vallées est, au XVIIIe siècle, de qualité supérieure à celui cultivé en plaine. Cette plante textile est donc largement utilisée, subissant le même traitement que le chanvre : rouissage, broyage dans les foulons, teillage puis filage au rouet. Les meilleurs champs se trouvaient aux Pècles et surtout à Vallorcine.

    Beaucoup plus fin que le chanvre, le lin est réservé au linge de corps, aux vêtements pour bébés et aux toiles dans lesquelles seront taillés les vêtements des jours de fête.

    La laine : chaque famille élève quelques moutons pour la laine. Les hommes ont appris, génération après génération, à coucher les moutons et à les immobiliser pour la tonte. Aux femmes reviendra le travail de lavage, cardage et filage de la laine au rouet.

    Le drap de Séez : il sera très longtemps privilégié par les montagnards de la vallée qui lui reconnaissent ses grandes qualités : solidité, chaleur, imperméabilité. Les guides de haute montagne plébiscitent cette étoffe épaisse et inusable qui résiste à toutes les intempéries. Si même le granit des aiguilles n’en vient pas à bout c’est parce que la laine a subi un traitement très particulier. Dix-sept opérations sont nécessaires pour passer de la laine à l’état brut à cette étoffe incomparable. Nettoyée à la main, lavée, rincée, essorée, éventuellement teintée avant d’être séchée, la laine a ensuite été battue et ensimée à l’oléine (huile végétale) avant de passer au cardage, puis au tissage.

    La dernière touche se fera sur le tissu lui-même. L’étoffe de laine ainsi obtenue est alors grattée (une machine aux pointes métalliques remplace les chardons d’antan) ou foulonnée. Cette dernière opération confère à la laine sa solidité et sa résistance tout en la rendant imperméable au froid, au vent et à la neige. En effet, ce foulon historique feutre entre ces deux roues de bois le tissu humide enduit de savon noir ; Ce que la pièce de tissu perd en largeur et longueur se transforme alors en une densité qui la rend inusable.

    La soie : matériau noble et onéreux, la soie arrive au pays par les colporteurs. Parfois, on a la chance de pouvoir s’offrir quelque galon multicolore ou, mieux encore, un coupon moiré… la promesse d’un beau châle que l’on ornera de charmantes broderies.

    Le cuir : tout proche, Sallanches est équipé de plusieurs tanneries et cordonneries. Le cuir reste donc assez accessible pour les habitants de la vallée qui vont le préférer aux sabots de bois.

    Le costume féminin

    Le costume traditionnel témoigne toujours du niveau social de celle qui le porte. Ainsi, à Chamonix, les femmes ont-elles, à de nombreuses époques, porté des vêtements simples reflétant leurs ressources limitées, leur manque de fantaisie ou la rigueur du climat.

    On a confectionné les tenues ordinaires, de couleur foncée, dans un drap parfois assez grossier avec quelques plis ajustés dans le dos et le corsage cousu à la jupe.

    Au contraire, les habits du dimanche, revêtus pour se rendre à la messe, sont plus précieux. La jupe, plutôt claire avant l’Annexion et sombre pendant la deuxième moitié du XIXe siècle, nécessite plus de quatre mètres de tissu pour former les fronces de la taille ou les plis plats dans le dos qui lui donneront toute son ampleur.

    Par-dessus la jupe, on noue un tablier de soie ou de satin, brodé ou tissé, souvent assorti au mouchoir, châle couvrant les épaules. Trois plis épinglés le maintiennent en place sous la nuque. Parfois, une providentielle brodeuse offre ses doigts de fée pour créer sur les carrés de soie, dessins, arabesques ou bouquets fleuris. On peut aussi choisir une belle soie tissée, frangée de fils torsadés. Le châle de laine est réservé aux journées les plus froides. Dans certaines paroisses, les femmes qui ont la chance d’en posséder plusieurs peuvent assortir les couleurs à la fête religieuse : violet pour l’Avent et le Carême, blanc pour le Saint Sacrement et les fêtes mariales, bleu pour le deuil…

    L’habit de fête serait triste s’il n’était éclairé par quelque bijou ! La traditionnelle croix en or brille, bien sûr, sur toutes les poitrines : croix de Megève, croix bâton ou croix Jeannette… parfois doublée d’un cœur. Offerts par le fiancé à sa promise, les bijoux symbolisent la foi en Dieu et la fidélité des époux.

    Blanche ou noire, la coiffe ou béguine

    Coiffe traditionnelle des femmes de la vallée de Chamonix, la béguine se porte en blanc pour les demoiselles et en noir pour les dames.

    Sur une simple charlotte enveloppant la tête et disciplinant les mèches de cheveux, la couturière – ou la modiste – fixera, en les superposant, les quelque six ou sept rangs de tuyautés de tulle, formant ainsi une splendide couronne de dentelle. Deux mètres et demi de ruban de tulle de quinze centimètres de largeur, un cadre garni de trois cents petits clous et une bonne trentaine d’heures de travail seront nécessaires pour parvenir à cet effet : former, par pliages successifs, une dentelle de petits « tuyautés » à coudre sur l’avant du bonnet. Plusieurs rangées superposées dessineront bientôt un diadème de dentelles les plus fines.

    Préparer l’empesage du tulle : faire fondre de la poix, y ajouter un peu d’amidon, et tremper dans ce mélange les bandes de tulle, éventuellement le fond de la coiffe et la bande de montage du tuyauté. Bien essorer délicatement et repasser. À l’aide du cadre de bois garni de clous, tuyauter la bande de tulle. La bande de tulle se tortille alors en multiples petits plis courts et réguliers constituant autant de petites corolles qui viendront s’ouvrir sur le devant de la coiffe et orneront le front et les tempes. Les clous retenant la partie supérieure sont alors retirés et les plis, désormais formés et marqués par l’amidonnage, sont fixés par une solide couture. Les clous retenant la partie inférieure sont, à leur tour, ôtés et la bande de tulle se trouve libérée.

    Le costume masculin

    À Chamonix, les danseurs des Rhodos ont l’honneur de porter le costume de Jacques Balmat, le vainqueur du Mont-Blanc en 1786. Très sobre, ce costume garde néanmoins une certaine élégance et ne conviendrait pas aux travaux des champs. Par contre, avec son pantalon serré aux genoux, ses bandes molletières, sa veste ajustée et son chapeau à large bord, il s’adapte parfaitement aux intempéries en haute montagne. Les guides de la Compagnie s’en inspireront largement, au fil des décennies, pour leurs tenues de travail comme pour les cérémonies.

    Le pantalon à pont, serré aux genoux, est cousu dans du gros drap de Séez noir ou brun. Il est prévu avec une large taille, de grandes poches extérieures et des bretelles. Pour absorber la sueur et préserver le corps des refroidissements, une large ceinture de flanelle sangle la taille. Des bandes molletières, des chaussettes montantes ou des guêtres (sôcales) couvrent les jambes en enserrant le bas du pantalon.

    L’ample chemise, en lin ou en chanvre, comporte des manches longues boutonnées et un très long pan (panté) dans le dos. « Le panté se ramenait vers l’avant et évitait le port du caleçon et le contact rude de l’étoffe des pantalons. »

    La veste, du même drap épais que le pantalon, est courte et ajustée. Neige, vent, grésil… Rien ne passera. L’étoffe a été volontairement feutrée. Elle est devenue imperméable.

    Le chapeau à large bord préserve les yeux et la peau des rayonnements solaires. Il s’avère très efficace lors des ascensions en montagne où la réfraction du soleil sur la neige s’ajoute au soleil. On y adjoindra parfois une petite voilette.

    Bibliographie

    Paul Payot : Au royaume du Mont-Blanc – Estella Canziani : Costumes, mœurs et légendes de Savoie – Patrice Mesnier : Béguin pour une béguine – Marie-Thérèse Hermann : Architecture et vie traditionnelle en Savoie – A.Den Doolaard : Le vainqueur du Mont-Blanc – Site internet Sabaudia : les dossiers – Site internet filature de Séez – Encyclopédie Bonneton : La Savoie, poésie des lacs et des montagnes – Collectif : Chamonix, une vallée, des hommes

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